mercredi 12 septembre 2012

"Love & Pop" de Ryu Murakami

Love & Pop aborde une forme de prostitution propre au Japon, dont Murakami avait déjà fait le sujet troublant de son film Tokyo Decadence. Par l'intermédiaire des messageries téléphoniques, de jeunes lycéennes acceptent des rendez-vous avec des inconnus pour pouvoir s'acheter des produits de marque. Le roman raconte la journée d'une jeune fille qui, désirant absolument s'offrir une topaze impériale, accepte coup sur coup, deux rendez-vous avec des hommes. Mais les rencontres ne vont pas se passer comme elle l'avait prévu. « La littérature n'a que faire des questions de moralité », dit Murakami, qui a construit son roman à la manière d'une œuvre d'Andy Warhol, en fondant dans la narration des bribes de conversations, d'émissions de radio ou de télévision, des litanies de marques, de titres de films ou de paroles de chansons à la mode. Comme un bruit de fond faisant soudain irruption au premier plan pour saturer le sens de ces rencontres qui ouvrent sur toutes les possibilités de l'humain. Tandis qu'une violence latente se fait de plus en plus pressante et précise. 
 
« Eh bien....alors.
Oui, je prends votre commande.
Euh...alors un super Vanilla Shake.
Un super Vanilla Shake.
Un seul, s'il vous plaît.
Entendu, alors cela vous fait exactement 206 yens. Un instant, s'il vous plaît. Pardon de vous avoir fait attendre, voici votre ticket.
Oui.
Voici votre ticket, cela vous fera très exactement 206 yens. Merci beaucoup.
Un Ice Tea, small size.
Oui, vous le préférez au citron ou au lait ?
Au sirop de gomme seulement.
Oui, entendu. Cela fait 155 yens. Un instant, s'il vous plaît. Voilà, pardon pour l'attente. Oui. Vous me donnez 1000 yens et 5 yens. Je vous rends 850 yens. Merci infiniment. Bienvenue. Oui. Je vous en prie, dès que vous aurez décidé de votre commande, je vous en prie. Bienvenue. »

« J'ai décidé de me procurer cette bague. Les choses que l'ont croit importantes ont tendance à s'effacer si facilement lorsqu'on se lève et regarde la télé, écoute la radio, feuillette un magazine ou parle avec quelqu'un. »

« Quand bien même tomberais-tu à genoux devant moi et me demanderais-tu en versant des larmes de tout oublier, jamais je ne reviendrais vers toi. D'amour, je n'ai plus besoin, l'amour m'a ligotée et je ne peux plus bouger. Ces mots innocents me blessent, les jours sans amour sont des jours de liberté, personne ne me fera de reproches et pourtant, si tu ouvrais maintenant cette porte, je ne sais pas ce que je ferais, peut-être passerais-je à ton côté et m'enfuirais-je, dans de profondes profondes profondes ténèbres, je repense à cet amour : oubliés les nuits sans sommeil et les jours de pluie. Quand elle eut terminé de chanter, Noda Chisa et Kakegawa se serrèrent la main. »

« Je cherche une jeune fille, maximum lycéenne, pour un rendez-vous aujourd'hui, dès maintenant. Je suis célibataire et j'habite à Tokyo, j'ai 29 ans. Je suis un petit gabarit, je mesure 1 mètre 66 mais je suis vraiment très doux avec les femmes, je cherche une fille que je saurai combler en lui laissant prendre l'initiative. Je souhaite si possible une fille pas trop grosse, une vraie vicieuse qui aime baiser. Je suis prêt à étudier toutes les conditions en vue de les satisfaire mais je pense offrir environ 50 000 yens. Si cela convient à une fille, qu'elle me laisse un message. Si c'est une fille qui a un bipeur, qu'elle laisse aussi le numéro de son bipeur. Au revoir.
Enregistré aujourd'hui, à 16heures 41 minutes.
Message suivant, je vous en prie. »

« Hiromi remarqua qu'il ne faisait plus de tseu et que tout en disant "amour, c'est amor", il lui avait pris la main droite avec ses deux mains pour l'introduire dans la poche gauche de son pantalon. La poche était trouée et Uehara ne portait pas de sous-vêtement.
- S'il te plaît, tiens-la comme ça.
Hiromi était stupéfaite, il lui serrait si fort la main qu'elle en avait mal et elle sentait la colère monter en elle mais elle n'eut pas la force de refuser et saisit le membre gonflé d'Uehara. Il était chaud, gros. La sensation dans sa main était étrange.
-Ne t'inquiète pas, j'ai mis un condom, tu te saliras pas les mains. »

« - T'en as de la chance, hein Fuzz ! Elle connaît. Bon, eh bien, Capitain Eo a un sac à dos jaune de chez Baskin posé près de lui et boit un thé au lait chaud, hein ? Ah oui, bien sûr... »

« - C'est pas une chose à faire, ce que tu fais ! Se mettre nue devant un homme que tu ne connais pas. Si quelqu'un l'apprenait, il est probable qu'il te désapprouverait. Car ce quelqu'un, il existe forcément, tout le monde a forcément quelqu'un qui, lorsqu'il est seul, lorsqu'il est triste, pleure tout seul, il y a forcément quelqu'un dans ce genre de circonstances qui...est-ce que tu imagines ce que ça lui ferait d'apprendre que cette femme si importante pour lui, que cette femme est nue en ce moment devant un homme ? Non, toi, tu ne comprends pas, tu penses que personne ne pense à toi en ce moment, maintenant, alors qu'on te touche les seins, que tu es nue, dans un moment pareil, maintenant, il y a quelqu'un que le chagrin accable, quelqu'un de triste à en mourir ! »



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